Le 21 juin dernier, Emilien Bayette, élève administrateur territorial, a été élu co-président de La Cordée à l’issue de l’AG de l’association. Il exerce cette fonction aux côtés de Rébecca Deprez, actuelle co-présidente et DGA dans une collectivité. Un passage de flambeau émouvant pour Damien Zaversnik, le président fondateur de La Cordée qui laisse sa place après avoir créé et fait évoluer l’association depuis ces huit dernières années.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Rebecca Deprez : J’ai 40 ans et je suis cadre territoriale depuis quatorze ans maintenant. Après des études de sciences politiques, j’ai débuté ma vie professionnelle en 2011 comme chargé de mission handicap dans une collectivité d’Île-de-France après avoir réussi le concours d’attaché territorial. J’ai ensuite poursuivi ma carrière dans des communes différentes sur des postes dans le domaine de l’Éducation. Je suis aujourd’hui DGA dans une grande commune en région parisienne et je travaille toujours dans le secteur de l’Éducation mais aussi plus spécialement pour le domaine de la jeunesse ainsi que sur les sujets de la politique de la ville et de l’égalité femmes-hommes. Et je déploie bien sûr la politique éducative en lien avec l’équipe municipale.
Emilien Bayette : J’ai 27 ans et je vais bientôt prendre mon poste à la Direction des Finances du département du Val de Marne après avoir terminé ma scolarité à l’INET. Dans un contexte budgétaire contraint, ce qui m’anime c’est de trouver des solutions pour assurer le financement des politiques publiques au service des usagers. Mais la fonction publique n’était pas une évidence pour moi. J’ai grandi dans le département rural des Ardennes et dans une famille où il n’y avait pas de fonctionnaires. Mes grand-pères étaient mineurs et mon père, ouvrier, n’a pas le bac. C’est un de mes professeurs de lycée, Monsieur Goury, qui m’a poussé à candidater à un programme que Science-Po Lille mettait en place pour des étudiants boursiers. J’ai été admis dans ce cursus en cinq ans jusqu’au Master Affaires publiques où, là encore, un professeur m’a poussé à candidater en classe Prépa à l’issue de laquelle j’ai intégré l’INET.
Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre la Cordée et pourquoi le thème de l’égalité des chances est important pour vous ?
Rebecca Deprez. J’ai connu La Cordée il y a quelques années via un de mes collègues DGA qui était lui-même membre de l’association. Il avait publié un post de l’association sur les réseaux sociaux concernant les interventions scolaires qu’elle menait dans différents établissements avec des bénévoles. Cela m’a vraiment intéressée et donné envie de rejoindre La Cordée car je trouvais cette action pertinente. Je l’ai finalement intégrée il y a quatre ans à un moment particulier où elle répondait à un appel à projet pour mettre en œuvre du mentorat. Nous y avons répondu en créant différents parcours pour accompagner des jeunes vers la réussite aux concours. J’ai été rapidement associé à des groupes de travail sur le sujet du mentorat qui était nouveau pour moi afin de co-construire véritablement cet appel à projet que nous avons remporté. Et il a véritablement permis de structurer les différents programmes de La Cordée (Prépa-Talents, Ambition Service Public, etc.) que l’on connaît aujourd’hui.
Emilien Bayette. J’ai connu La Cordée pendant mon année de Prépa car elle m’a mis en relation avec Damien Zaversnik, le président fondateur, qui a été mon mentor. Sur sa proposition, j’ai rejoint l’association à la suite de ma réussite au concours d’administrateur territorial. La question de l’égalité des chances a toujours été un fil rouge pour moi. Si des professeurs de lycées et d’écoles publiques ne m’avaient pas poussé à tenter ma chance, je n’en serais pas là aujourd’hui. Il faut dire aussi que j’ai été victime de mépris social en lien avec mes origines ouvrières quand je suis rentré à Science-Po Lille. Dans cet environnement que je ne connaissais pas, j’ai beaucoup lutté à l’époque contre l’auto-censure et ma croyance en mes capacités limitantes. Heureusement, j’ai eu la chance de partir à l’étranger en 3ème année d’études et notamment au Canada où j’ai été collaborateur parlementaire. A mon retour, j’avais gagné une forme de confiance en moi et je me sentais davantage à ma place. Progressivement, je me suis enfin autorisé à passer les concours.
Quels seront vos objectifs en tant que co-président pour la prochaine mandature ?
Rebecca Deprez. Mon souhait principal est bien sûr de continuer à développer l’association. J’ai envie que l’on continue de porter cette vision positive de la Fonction publique au-delà des clichés que l’on peut en avoir ! Non elle n’est pas figée et oui on peut y faire carrière et évoluer même si on vient d’un territoire rural ou d’un quartier prioritaire. Je souhaite également que nous mettions en place des actions pour augmenter notre nombre de bénéficiaires et bénévoles. L’objectif est d’embarquer toujours plus d’agents publics, de créer une vraie dynamique autour de ce sujet d’égalité des chances. Et j’aimerais d’ailleurs que nos administrations soient toujours plus accueillantes avec nos bénéficiaires. Elles pourraient davantage leur proposer des stages, des journées découvertes, etc. Cela passera notamment par des partenariats avec différentes administrations et aussi par nos mentors agents publics qui ouvriront leur réseau.
Emilien Bayette. Je souhaite “territorialiser” davantage l’association qui est très présente en région parisienne. J’aimerais renforcer notre assise en régions ainsi que les interventions scolaires et le mentorat. J’aimerais d’ailleurs que notre évènement de plaidoyer ait lieu l’année prochaine en dehors de Paris. Et je ne vous cache pas que mon rêve le plus fou serait de monter des Assises ou un congrès d’été dans les Ardennes sur le thème du service public ! J’aimerais aussi particulièrement sécuriser notre offre de mentorat en l’étendant à de nouveaux publics : les femmes, les personnes en situation de handicap, les internes, les agents des catégories B et C, etc. N’oublions pas que les concours «Talents » ont été menacés de disparition récemment même s’ils ont finalement été prolongés jusqu’au 31 août 2028.
Comment comptez-vous travailler avec les bénévoles ?
Rebecca Deprez. Je souhaite continuer à développer le mentorat dans l’association. Nous nous appuyons aujourd’hui sur près de 800 mentors agents publics mais demain ils seront plus nombreux à mesure que nous déployons nos programmes ! Ils sont en quelque sorte les Ambassadeurs de La Cordée, ils doivent en parler davantage dans leur administration pour que le bouche-à-oreille fonctionne et que de nouveaux mentors nous rejoignent. Je souhaite aussi qu’ils s’engagent de façon plus systématique à nos côtés en devenant adhérents. Il faut aussi bien sûr amplifier nos actions en région via nos délégations territoriales composées de bénévoles agents publics des territoires. Ils sont chargés d’animer et de trouver des partenariats au niveau local. Aujourd’hui, notre association fonctionne grâce à notre réseau de bénévoles et nous leur en sommes très reconnaissants.
Emilien Bayette. Il faut repenser le parcours des adhérents et bénévoles, et notamment en région. Je souhaite y insuffler plus de rencontres et d’évènements en présentiel. J’aimerais que nos bénévoles se sentent libres de faire des propositions, de lancer des projets dans les territoires. Ils peuvent faire preuve d’audace ! Ce sont eux qui font la vitalité de l’association et c’est pourquoi j’aimerais éventuellement intégrer une dose de consultation, de démocratie participative on pourrait dire dans l’association. Par exemple, consulter nos adhérents sur une orientation, un projet que l’on voudrait tester. Il faut aussi élargir bien sûr notre vivier adhérents. J’aimerais d’ailleurs que ces derniers, qui œuvrent parfois dans l’ombre, par exemple, en faisant réviser des oraux à nos bénéficiaires, soient davantage mis en valeur. Et pourquoi pas une cérémonie de remise des prix à nos adhérents les plus méritants ? Il faut que nous soyons capables de créer une vraie appartenance à l’association, de créer une histoire commune, des souvenirs forts et partagés. Rendez-vous dans deux ans pour faire le bilan !
Les indiscrets sur les co-présidents :
Emilien Bayette
Sport préféré : la natation (grande passion pour Léon Marchand)
Dernier livre lu : Ne t’arrête pas de courir !
Chanteur ou chanteuse favori : Lady Gaga
Rebecca Deprez :
Sport préféré : le tennis
Dernier livre lu : « Résister » Salomé Saqué
Chanteur ou chanteuse favori : Stromae